Récemment, un client un peu angoissé (on peut le comprendre) m’a assuré que plusieurs personnes étaient disposées à témoigner en sa faveur, et qu’il pensait pouvoir les faire venir au Tribunal.
Soyons clairs : on ne témoigne quasiment jamais au civil (ou au prud’hommes, d’ailleurs). Les audiences ne durent jamais très longtemps, et souvent la procédure est écrite. En outre, parfois l’enjeu financier du litige est tel que le juge n’a aucunement l’intention d’écouter qui que ce soit d’autre que les avocats en présence.
Est-ce à dire qu’on ne peut pas du tout témoigner ? Que nenni. Il suffit de le faire par écrit, c’est tout.
Par contre, dans ce cas, il faut le faire bien car des conditions de forme sont imposées.
Donc, si Monsieur Martin est disposé à apporter son témoignage à Monsieur Dupont, ce dernier doit s’assurer que ledit témoignage écrit est conforme.
Tout d’abord, ce témoignage est manuscrit. Eh oui, on n’y coupe pas, mais ça permet au juge d’être raisonnablement sûr que la personne n’a pas signé une document qu’on lui a présenté, et qu’elle est consciente du contenu.
Ensuite, l’attestation doit mentionner les noms et prénoms de Monsieur Martin, sa date et son lieu de naissance ainsi que son domicile.
Monsieur Martin doit ensuite préciser sa profession et quels sont ses liens avec la personne en faveur de qui il témoigne.
Il doit ainsi indiquer s’il est de la même famille, si c’est un ami, un employé, une relation de travail, une vague connaissance, un voisin… Moins Monsieur Dupont et Monsieur Martin sont proches, plus on peut penser que l’attestation est impartiale.
Ensuite vient la formule magique qui, en principe, doit décourager les témoignages de complaisance. Monsieur Martin doit en effet écrire en toutes lettres sur son attestation :
«Je reconnais avoir été informé que la présente attestation est destinée à être produite en justice et que toute fausse déclaration de ma part m’exposerait à des sanctions pénales. Fait pour valoir ce que de droit».
Ainsi, si Monsieur Martin raconte des calembredaines, il ne pourra pas dire qu’il n’avait pas été averti.
Ensuite, notre témoin peut raconter par le menu ce qu’il a envie de dire en faveur de Monsieur Dupont. De préférence, il doit s’agir de faits qu’il a personnellement constaté. Relater des on-dit est très vivement déconseillé.
Une fois terminé, il ne lui reste plus qu’à dater et à signer.
Et c’est fini… ou presque. Pour que l’attestation soit parfaite, Monsieur Martin doit y joindre la photocopie de sa carte d’identité (ou de son titre de séjour s’il n’est pas français. Eh oui, on n’encourage guère les sans-papiers à témoigner).
Et voilà, c’est fait. Monsieur Dupont dispose désormais d’une preuve qu’il pourra glisser à volonté dans son dossier pour le rendre plus convaincant sans même que Monsieur Martin ait eu besoin de se déplacer le jour de l’audience. Magique.