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Surélévation d’un pavillon en copropriété

En matière de copropriété, la surélévation et très encadrée, afin de respecter les droits de chacun.

Elle est régie par l’article 35 de la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété, qui pose un certain nombre de conditions impératives à respecter.

De façon synthétique, il faut retenir que:

  • Par principe, la surélévation se vote à la majorité de l’article 26 de la loi.
  • Cependant, lorsque le bâtiment est situé dans un périmètre sur lequel est institué un droit de préemption urbain (DPU, soit le droit d’une collectivité locale d’acheter en priorité des biens mis en vente dans des zones préalablement définies), la majorité applicable est celle de l’article 25 de la loi.
  • La surélévation est réalisée soit par le syndicat, soit par une personne qui bénéficie de ce droit, généralement aliéné à son profit par le Syndicat des Copropriétaires.
  • Lorsque la copropriété comporte plusieurs bâtiments, il faut deux votes: d’abord le vote de toute la copropriété, puis ensuite le vote du bâtiment concerné.

L’opération de surélévation est donc relativement lourde et complexe, afin de préserver les droits de tous.

Cependant, lorsque le bâtiment à surélever est un pavillon compris dans une copropriété, la situation est différente.

En effet, les règles que je viens de rappeler ne s’appliquent que si la surélévation constitue la mise en oeuvre d’un droit accessoire aux parties communes.

En l’absence de parties communes dans le bâtiment concerné, il n’y a pas cette mise en oeuvre d’un droit accessoire aux parties communes.

Ainsi, si le bâtiment à surélever est entièrement composé de parties privatives, y compris sa structure (gros murs, charpente, toiture, etc…) on va considérer que la surélévation du bâtiment est la mise en oeuvre d’un droit privatif.

Il n’y a donc pas, dans cette hypothèse, à solliciter l’autorisation de l’Assemblée Générale en matière de surélévation.

Cela ne veut pas dire pour autant que les travaux peuvent être faits en toute liberté.

En effet, les travaux envisagés vont nécessairement modifier l’aspect extérieur du pavillon considéré.

Dans ce cas, c’est l’article 25 b de la loi qui trouve à s’appliquer:

« Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant: (… ) b) L’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ».

Il faut donc impérativement obtenir cette autorisation avant de faire les travaux.

Mais, allez-vous me dire, quel intérêt à la distinction ? Dans toutes les zones avec DPU, la majorité sera la même !

C’est vrai, c’est la même majorité.

Mais, et c’est un point d’importance, le fondement du vote n’est pas le même. En cas de surélévation, c’est l’article 35 de la loi. En cas de travaux qui modifient l’aspect extérieur de l’immeuble, c’est l’article 25b.

Or, lorsque des copropriétaires refusent à l’un d’entre eux des travaux sur le fondement de l’article 25b, la loi prévoit en son article 30 un dispositif spécifique:

« Lorsque l’assemblée générale refuse l’autorisation prévue à l’article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d’amélioration visés à l’alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées ». 

Autrement dit, quand vos travaux ont été rejetés sur le fondement de l’article 25b, vous pouvez saisir le Tribunal pour obtenir une autorisation judiciaire qui va annuler et remplacer le refus de la copropriété.

Vous pouvez aller consulter cet article consacré à ce mécanisme.

Il est donc tout à fait intéressant de faire attention à mettre à l’Ordre du Jour les bons travaux, pour, en cas de refus, disposer d’un recours efficace devant le Tribunal.

Changement d’usage d’un lot de copropriété et destination de l’immeuble

Comme je l’ai déjà expliqué dans un article précédent, il faut être prudent lorsqu’on veut changer l’usage d’un lot en copropriété.

En effet, l’usage d’un lot doit respecter la destination de l’immeuble. 

Destination de l’immeuble

Pour rappel, tout immeuble en copropriété a une destination globale : habitation, commerciale, professionnelle, artisanale, industrielle… Sachant qu’il y a fréquemment des destinations mixtes, les plus fréquentes étant le trio habitation/usage professionnel/commerces (ces derniers étant généralement relégués au rez-de-chaussée). 

Une fois que cette destination est établie, elle oblige les copropriétaires à utiliser leurs lots dans le respect de cette destination. 

Par exemple, dans un immeuble purement d’habitation, il est strictement interdit d’installer des bureaux, un cabinet médical ou un commerce, quand bien même serait-il au rez-de-chaussée. 

La destination, garante de la sécurité juridique des copropriétaires

La raison d’être de cette règle est de garantir l’aspect contractuel du Règlement de Copropriété. 

En effet, le Règlement est, essentiellement, un contrat qui régit les règles entre copropriétaires. 

Il faut donc s’assurer que les dispositions de ce contrat soient respectées, de sorte que celui qui achète un lot ne se retrouve pas contraint de supporter des sujétions imprévues. 

Autrement dit, il s’agit de s’assurer que ceux qui ont acquis un lot sur la base de dispositions fixées contractuellement dans le Règlement, puissent, légitimement, exiger la pérennité de ces dispositions. Et, notamment, la destination globale de l’immeuble.  

Il s’agit donc, essentiellement, d’un principe de simple sécurité juridique. 

Par exemple, celui qui achète un lot dans un immeuble strictement résidentiel ne peut se voir imposer de supporter chez son voisin un activité industrielle. 

Ou d’ailleurs, l’inverse : celui qui achète un atelier artisanal dans un immeuble ayant cette destination exclusive, ne doit pas se voir gêné dans son activité par un voisin qui prétend utiliser son lot comme habitation, et qui exige de ne subir aucune nuisance, comme du bruit ou des odeurs. 

Le Syndicat des Copropriétaires peut forcer le respect de la destination de l’immeuble 

Toute infraction au respect de la destination de l’immeuble autorise le Syndicat des Copropriétaires à interdire l’usage d’un lot contraire au Règlement de Copropriété. 

Il faut donc être fort prudent au moment où l’on acquiert ou loue un lot de copropriété, et s’assurer que l’usage auquel on le destine est autorisé. 

Généralement, il n’y a pas de difficulté particulière : il suffit ainsi de vérifier la destination de l’immeuble telle qu’elle résulte, explicitement ou implicitement, du Règlement de Copropriété, pour savoir ce qui est autorisé et ce qui est interdit. 

Et, généralement, surtout pour un usage d’habitation, il est relativement aisé de voir s’il est autorisé. 

Notamment, comme je l’expliquais dans mon précédent article, dans un immeuble mixte habitation/commercial/professionnel, il est généralement aisé de transformer un lot professionnel ou commercial en logement (sous réserve, toutefois, d’éventuelles interdictions mentionnées dans le Règlement de Copropriété). 

Mais pour installer par exemple un bureau ou un commerce dans un lot à usage initial de logement, il faudra s’assurer que cette activité est autorisée. 

Le changement d’usage d’un lot

Voyons maintenant l’hypothèse du changement d’usage d’un lot, qui serait contraire à la destination de l’immeuble.  

Sur le principe, vous l’aurez compris, ce changement ne peut intervenir. 

En effet, utiliser un lot à titre, par exemple, commercial, dans un immeuble strictement résidentiel revient à changer la destination de tout l’immeuble, qui de résidentiel devient résidentiel et commercial

Or comme cette destination est un élément contractuel fondamental de l’immeuble en copropriété, elle ne peut être modifiée du simple souhait d’un copropriétaire. 

C’est notamment la traduction du principe de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 : 

L’assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu’elles résultent du règlement de copropriété.

Toutefois, comme je l’indiquais plus haut, le Règlement de Copropriété a un caractère contractuel. Donc, comme tout contrat, il peut être modifié de par la volonté de toutes les parties. 

Autrement dit, la destination d’un immeuble peut être modifiée si elle est décidée à l’unanimité de toutes les parties, donc ici, de tous les copropriétaires, et pas uniquement des présents et représentés à une Assemblée Générale donnée. 

Il est donc possible, via un vote unanime de tous, de modifier cette destination. 

La même règle s’applique lorsqu’il s’agit, même pour un seul lot, d’avoir un usage, donc une affectation, contraire au Règlement de Copropriété. 

Si vous voulez modifier l’affection du lot, donc son usage pratique, dans un sens non prévu par le Règlement de Copropriété, vous n’avez donc d’autre choix que d’obtenir un vote unanime. 

Ce qui sera quasi-impossible sauf dans une très petite copropriété, ne serait-ce qu’à raison de l’absentéisme habituel en matière d’Assemblées Générales. 

Je déconseille donc fortement d’acquérir un lot en pensant lui affecter un usage non prévu par le Règlement de Copropriété, car cela revient à être en contradiction avec ce règlement, avec des chances quasi inexistantes de changer la situation. 

© 2023 Marie Laure Fouché

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