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Étiquette : destination de l’immeuble

Pas d’Airbnb dans un immeuble d’habitation

La problématique des locations Airbnb 

Ces dernières années, les locations touristiques de courte durée, souvent désignées par le terme « Airbnb », du nom de la plateforme la plus célèbre, sont mal vues par les municipalités.

En effet, elles ont pour effet de renforcer le vide les centre-villes et de rendre le logement de plus en plus inaccessible aux habitants. 

Appâtées par la promesse de loyers importants, de nombreuses personnes transforment leurs logements en location touristiques de courte durée de type Airbnb. Elles le louent de façon intensive à l’année, ce qui fait monter considérablement le prix de l’immobilier. 

Egalement, on assiste à de nombreux achats de logements dans le but unique de les louer en courte durée, à des fins d’investissement.

Ainsi s’ensuivent, pour les autres habitants, des nuisances à n’en plus finir : passage intensif, bruits permanents, voisins peu respectueux, tapage nocturne et diurne…

Airbnb et copropriété

Il faut toutefois savoir que souvent, les habitants d’un immeuble en copropriété peuvent éviter cette activité dans leur immeuble, dans certains cas. 

Pour cela, il faut vérifier dans le Règlement de Copropriété quelle est la destination de l’immeuble. 

Pour en savoir davantage sur cette notion de destination, je vous invite à lire cet article, ainsi que cet article

La destination de l’immeuble, c’est, essentiellement, l’usage autorisé pour l’ensemble. 

Il peut s’agir d’une destination d’habitation, de commerces, de bureaux, hospitalière, scolaire… 

Mais le plus souvent, dans un immeuble comportant des habitations, la destination est tout simplement d’habitation, avec une destination commerciale des locaux du rez-de-chaussée qui abritent des boutiques, et une tolérance pour les professions libérales dans les étages. 

Le point important, ici, est de vérifier dans l’immeuble quelle est la destination du lot qui est affecté par son propriétaire à un usage de location touristique de courte durée type Airbnb. 

Destination de l’immeuble et Airbnb

Concrètement, la solution de principe est assez simple. 

Si le lot considéré a une destination d’habitation, et à plus forte raison, s’il est dans un immeuble à destination d’habitation (parfois qualifiée de « bourgeoise ») alors il ne peut pas abriter une activité de Airbnb. 

En effet, comme la Cour de Cassation l’a souligné de façon parfaitement claire dans un arrêt du 8 mars 2018 qui a été suivi par les Cours d’Appel et les Tribunaux judiciaires, une activité de type Airbnb est une activité commerciale. 

Elle ne peut donc être pratiquée que dans des lots ayant une destination commerciale. 

Pour récapituler 

Pour exercer une activité de type Airbnb, il faut que le Règlement de Copropriété de l’immeuble prévoie une destination commerciale, ET que le lot considéré entre dans cette destination. 

Par exemple, si tous les lots d’un immeuble sont à vocation d’habitation, professionnelle et commerciale, l’activité de location de courte durée peut être pratiquée dans tous les lots. 

Si cette destination est d’habitation dans les étages, et commerciale au rez-de-chaussée, il pourra y avoir un Airbnb au rez-de-chaussée, mais pas dans les étages. 

Et si tout l’immeuble est en habitation, toute activité de ce type est interdite. 

En conclusion, si vous voulez pratiquer cette activité, il faut vérifier qu’elle est autorisée pour votre lot, au chapitre destination du Règlement de Copropriété. 

Si une telle activité est pratiquée dans votre immeuble, dans un lot à destination d’habitation, celle-ci peut être interdite par le juge, sous astreinte. 

Enfin, toutefois, il faut faire attention à la prescription, qui est de 5 ans en matière de copropriété. 

Autrement dit, si l’Airbnb en question existe depuis plus de 5 ans, alors le Syndicat des Copropriétaires est prescrit à le faire interdire. Il faut donc agir vite sans laisser passer de délai. 

Changement d’usage d’un lot de copropriété et destination de l’immeuble

Comme je l’ai déjà expliqué dans un article précédent, il faut être prudent lorsqu’on veut changer l’usage d’un lot en copropriété.

En effet, l’usage d’un lot doit respecter la destination de l’immeuble. 

Destination de l’immeuble

Pour rappel, tout immeuble en copropriété a une destination globale : habitation, commerciale, professionnelle, artisanale, industrielle… Sachant qu’il y a fréquemment des destinations mixtes, les plus fréquentes étant le trio habitation/usage professionnel/commerces (ces derniers étant généralement relégués au rez-de-chaussée). 

Une fois que cette destination est établie, elle oblige les copropriétaires à utiliser leurs lots dans le respect de cette destination. 

Par exemple, dans un immeuble purement d’habitation, il est strictement interdit d’installer des bureaux, un cabinet médical ou un commerce, quand bien même serait-il au rez-de-chaussée. 

La destination, garante de la sécurité juridique des copropriétaires

La raison d’être de cette règle est de garantir l’aspect contractuel du Règlement de Copropriété. 

En effet, le Règlement est, essentiellement, un contrat qui régit les règles entre copropriétaires. 

Il faut donc s’assurer que les dispositions de ce contrat soient respectées, de sorte que celui qui achète un lot ne se retrouve pas contraint de supporter des sujétions imprévues. 

Autrement dit, il s’agit de s’assurer que ceux qui ont acquis un lot sur la base de dispositions fixées contractuellement dans le Règlement, puissent, légitimement, exiger la pérennité de ces dispositions. Et, notamment, la destination globale de l’immeuble.  

Il s’agit donc, essentiellement, d’un principe de simple sécurité juridique. 

Par exemple, celui qui achète un lot dans un immeuble strictement résidentiel ne peut se voir imposer de supporter chez son voisin un activité industrielle. 

Ou d’ailleurs, l’inverse : celui qui achète un atelier artisanal dans un immeuble ayant cette destination exclusive, ne doit pas se voir gêné dans son activité par un voisin qui prétend utiliser son lot comme habitation, et qui exige de ne subir aucune nuisance, comme du bruit ou des odeurs. 

Le Syndicat des Copropriétaires peut forcer le respect de la destination de l’immeuble 

Toute infraction au respect de la destination de l’immeuble autorise le Syndicat des Copropriétaires à interdire l’usage d’un lot contraire au Règlement de Copropriété. 

Il faut donc être fort prudent au moment où l’on acquiert ou loue un lot de copropriété, et s’assurer que l’usage auquel on le destine est autorisé. 

Généralement, il n’y a pas de difficulté particulière : il suffit ainsi de vérifier la destination de l’immeuble telle qu’elle résulte, explicitement ou implicitement, du Règlement de Copropriété, pour savoir ce qui est autorisé et ce qui est interdit. 

Et, généralement, surtout pour un usage d’habitation, il est relativement aisé de voir s’il est autorisé. 

Notamment, comme je l’expliquais dans mon précédent article, dans un immeuble mixte habitation/commercial/professionnel, il est généralement aisé de transformer un lot professionnel ou commercial en logement (sous réserve, toutefois, d’éventuelles interdictions mentionnées dans le Règlement de Copropriété). 

Mais pour installer par exemple un bureau ou un commerce dans un lot à usage initial de logement, il faudra s’assurer que cette activité est autorisée. 

Le changement d’usage d’un lot

Voyons maintenant l’hypothèse du changement d’usage d’un lot, qui serait contraire à la destination de l’immeuble.  

Sur le principe, vous l’aurez compris, ce changement ne peut intervenir. 

En effet, utiliser un lot à titre, par exemple, commercial, dans un immeuble strictement résidentiel revient à changer la destination de tout l’immeuble, qui de résidentiel devient résidentiel et commercial

Or comme cette destination est un élément contractuel fondamental de l’immeuble en copropriété, elle ne peut être modifiée du simple souhait d’un copropriétaire. 

C’est notamment la traduction du principe de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 : 

L’assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu’elles résultent du règlement de copropriété.

Toutefois, comme je l’indiquais plus haut, le Règlement de Copropriété a un caractère contractuel. Donc, comme tout contrat, il peut être modifié de par la volonté de toutes les parties. 

Autrement dit, la destination d’un immeuble peut être modifiée si elle est décidée à l’unanimité de toutes les parties, donc ici, de tous les copropriétaires, et pas uniquement des présents et représentés à une Assemblée Générale donnée. 

Il est donc possible, via un vote unanime de tous, de modifier cette destination. 

La même règle s’applique lorsqu’il s’agit, même pour un seul lot, d’avoir un usage, donc une affectation, contraire au Règlement de Copropriété. 

Si vous voulez modifier l’affection du lot, donc son usage pratique, dans un sens non prévu par le Règlement de Copropriété, vous n’avez donc d’autre choix que d’obtenir un vote unanime. 

Ce qui sera quasi-impossible sauf dans une très petite copropriété, ne serait-ce qu’à raison de l’absentéisme habituel en matière d’Assemblées Générales. 

Je déconseille donc fortement d’acquérir un lot en pensant lui affecter un usage non prévu par le Règlement de Copropriété, car cela revient à être en contradiction avec ce règlement, avec des chances quasi inexistantes de changer la situation. 

Quelle valeur pour l’état descriptif de division ?

état descriptif de division Déjà, il faut définir ce qu’est l’état descriptif de division. Tout simplement, c’est la liste des lots de copropriété de l’immeuble. C’est donc la description des lots qui divisent l’immeuble.

Cela comprend donc, lot par lot, la description de celui-ci, son numéro, et le nombre de tantièmes de copropriété qui y sont attachés.

La question qui peut donc se poser est de savoir la valeur de cet état descriptif de division.

En effet, de nos jours, pour des raisons pratiques, l’état descriptif de division est inséré dans le Règlement de Copropriété, et en constitue généralement un article. Pour des immeubles un peu anciens, cet état peut constituer un document séparé.

Ceci étant précisé, il faut faire attention au fait qu’il n’a pas la même valeur que le Règlement de Copropriété.

Ainsi, le Règlement de Copropriété a une valeur contractuelle particulièrement importante: il constitue le contrat entre les copropriétaires. C’est la raison pour laquelle il ne peut être modifié qu’à des majorités très importantes, soit la majorité des deux tiers pour les décisions les moins importantes, et à l’unanimité pour le reste (article 26 de la loi du 10 juillet 1965).

D’une façon générale, en cas de questionnement sur un point quelconque, c’est au Règlement de Copropriété qu’il faut se référer. Sauf les quelques cas où il contient des clauses contraires à la loi (généralement car trop ancien) ses dispositions sont la loi des copropriétaires.

Or il n’en est pas ainsi pour l’état descriptif de division.

Ainsi, il n’a pas valeur contractuelle et n’est établi que pour les besoins de la publicité foncière.

De la sorte, en cas de contradiction entre le Règlement de Copropriété même et l’état descriptif de division, le Règlement de Copropriété prime toujours. Tout au plus cet état peut-il avoir une valeur d’indice pour interpréter le Règlement de Copropriété.

Par exemple, supposons le cas d’un Règlement de Copropriété qui dispose que les lots pourront indifféremment être utilisés comme boutique, habitation, bureaux. Or un des lots est décrit dans l’état descriptif de division comme des bureaux. Le copropriétaire de ce lot pourra donc l’utiliser comme habitation à sa guise, dans le respect de la destination de l’immeuble, et on ne pourra lui objecter la description de « bureau » dans l’ état descriptif de division pour le forcer à conserver un usage professionnel.

Ceci étant précisé, il faut souligner que récemment, la Cour de Cassation a assoupli cette position. Ainsi, au titre d’un arrêt du 6 juillet 2017, elle décide que dans le cas où le Règlement de Copropriété donne expressément, dans son texte, valeur contractuelle à l’état descriptif de division, celui-ci doit être pris en compte.

Dans ce cas d’espèce, alors qu’il était mentionné, globalement, que les lots pouvaient être utilisé tant en habitation que professionnellement, l’état descriptif de division mentionnait des appartements dans les étages, et non des bureaux. La Cour de Cassation a considéré que l’état descriptif de division, plus précis car évoquant les lots individuellement, devait être suivi et que malgré la clause globale, l’affectation des lots devait respecter l’état descriptif de division.

Il faut donc être vigilant aux termes du Règlement de Copropriété et voir s’il donne valeur contractuelle à l’état descriptif de division.

Puis-je utiliser mon lot de copropriété différemment de l’affectation prévue dans le Règlement de Copropriété ?

La question m’est très souvent posée, de savoir si un lot désigné d’une façon dans le Règlement de Copropriété, peut être utilisé différemment. Autrement dit,  peut-on changer son affectation.

Par exemple, on me demande si une cave peut être utilisée comme une salle de bains, si une remise peut être utilisée comme bureau, ou encore des combles aménagés en chambre.

En définitive, cela revient à poser la question de l’affectation du lot, autrement dit de son utilisation réelle, par comparaison avec la désignation du lot figurant au Règlement de Copropriété.

Pour répondre à la question, il faut d’abord aborder la notion de destination de l’immeuble.

La destination de l’immeuble est l’usage global auquel il est consacré. Il peut s’agir par exemple d’une destination d’habitation, commerciale, professionnelle, industrielle, scolaire, hospitalière… Le plus souvent les immeubles en copropriété ont une destination d’habitation, parfois mixte avec également une destination professionnelle (professions libérales, bureaux…) et/ou commerciale.

Normalement, cette destination est inscrite clairement dans le Règlement de Copropriété. Dans les copropriétés les plus anciennes, cela peut ne pas être le cas et elle se déduira de la typologie des lots. Par exemple, un immeuble avec des logements dans les étages et des boutiques au rez-de-chaussée aura une destination mixte d’habitation et commerciale.

Cette notion de destination est très importante en copropriété, à tel point qu’elle ne peut être changée en Assemblée Générale que par un vote à l’unanimité de tous les copropriétaires. En outre la liberté d’usage des parties communes n’est, essentiellement, limitée que par le respect de la destination, comme le précise l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, selon lequel:

« Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ».

Ceci étant précisé, revenons-en à la question de l’affectation, donc de l’usage réel du lot.

La règle est simple: on peut affecter ses parties privatives essentiellement comme on le souhaite, dans le respect de la destination de l’immeuble, et naturellement pour peu que l’on ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires.

Donc, si par exemple la destination de l’immeuble est l’habitation, on ne peut utiliser un lot pour une activité industrielle (sauf à ce que l’Assemblée Générale l’autorise à l’unanimité de tous les copropriétaires).

En revanche, dans le même immeuble d’habitation, on peut vouloir aménager des combles ou une remise en habitation. Pour peu que ces lots aient une configuration compatible avec l’habitation (fenêtre…) et respectent les normes d’habitabilité ce changement est libre et ne nécessite aucune autorisation en Assemblée Générale.

Cela peut s’appliquer aussi à d’autres lots « accessoires » comme des chambres de service.

En revanche, concernant une cave, il faut être prudent, essentiellement car elle n’aura souvent pas les caractéristiques techniques propres à l’habitabilité.

Enfin, n’oublions pas la question des bureaux. Peut-on les transformer en habitation librement ? Si l’immeuble a, outre sa destination professionnelle (de bureau) une destination également d’habitation, oui. En effet, transformer un bureau en logement, dans un immeuble notamment d’habitation ne pose aucune difficulté pour la destination, et a priori non plus pour les droits des autres copropriétaires.

Ceci étant précisé, il faut souligner que ce changement d’affectation, tel que décrit ici, concerne le droit de la copropriété. Ces règles ne dispensent donc pas le copropriétaire, de respecter les règles d’urbanisme. Notamment, il peut être interdit par la commune de transformer des logements en bureaux.

Enfin, outre le respect de la destination, il faut s’assurer que le Règlement de Copropriété ne contient pas de dispositions spécifiques sur le sujet, et qui seraient contraires au changement d’affectation. Par exemple, le Règlement de Copropriété va souvent interdire que certains lots d’habitation ne soient transformés en commerces ou bureaux. Dans un tels cas, le respect du Règlement de Copropriété s’impose.

Cependant, il faut souligner que récemment, la Cour de Cassation a assoupli cette position. 

Ainsi, au titre d’un arrêt du 6 juillet 2017, elle décide que dans le cas où le Règlement de Copropriété donne expressément, dans son texte, valeur contractuelle à l’état descriptif de division, celui-ci doit être pris en compte.

Ainsi, dans une telle hypothèse, l’affectation du lot, telle que mentionnée dans l’état descriptif de division, doit être respectée. De la sorte, l’état descriptif de division a dans cette hypothèse valeur contractuelle, comme le reste du Règlement de Copropriété, et on ne peut librement changer l’affectation des lots, même si on respecte la destination globale de l’immeuble.

Dans ce cas d’espèce de l’arrêt de la Cour de Cassation, alors qu’il était mentionné, globalement, que les lots pouvaient être utilisé tant en habitation que professionnellement, l’état descriptif de division mentionnait expressément des appartements dans les étages, et non des bureaux.

L’arrêt de Cour d’Appel retenait, en pratique, que l’état descriptif de division était mentionné au titre du chapitre « désignation » du Règlement de Copropriété de sorte qu’il avait valeur contractuelle.

La Cour de Cassation, comme la Cour d’Appel, a considéré que l’état descriptif de division, plus précis car évoquant les lots individuellement, devait être suivi et que malgré la clause globale, l’affectation des lots devait respecter l’état descriptif de division.

Il faut donc être vigilant aux termes du Règlement de Copropriété et voir s’il donne expressément valeur contractuelle à l’état descriptif de division.

 

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